HISTORIQUE DES CHAMANAMASS
« Tribu déchue d’une antique splendeur, les Chamanamass étaient autrefois la tribu aménokale des Sultans d’Essouk…» d’après les propos de l'Explorateur allemand BARTH1.
par Zeidan AG SIDALAMINE |
Chama N Amass signifie en Tamashaqt « Peuple du Centre » ou « Communauté du Centre » voire du « Juste milieu » :
- Chama : Peuple, Communauté, Tribu ;
- N : du ;
- Amass : Centre, Milieu.
Les Chamanamass de par la symbolique de leur nom et leur position centrale sur le plan géographique et social occupent une place politique et militaire de choix et jouent un rôle stratégique de médiateurs de proximité au sein des Touareg. Ils pratiquent un pouvoir tribal égalitaire caractérisé par une hiérarchisation sociale glissante d’une fraction (Tawset) à une autre et d’un groupe ethnique à un autre.
Les soumissions séparées aux Autorités coloniales françaises des Kountas en juin 1898, des Chérifènes de Mohamed Iknène à Gao en 1899, des Iwillimidens le 23 janvier 1903 à Gao, des Taïtoc de la Tribu des Idnanes le 30 juillet 1903 à Bamba, des Iforas en novembre 1903 à Insalah (Algérie française) n’ont pas dissuadé les Chamanamass à rentrer en rébellion en juillet-août 1904.
Saisi par le pouvoir colonial français pour stopper l’agitation des Chamanamass, Fihroun en janvier 1905 faisait écrire à Gao que « les Chamanamass vivent séparés de moi, du côté de Bourem, et ils échappent à mon autorité…» selon le Dr A. RICHER2, Médecin des Troupes coloniales.
En mars 1905, le Colonel RONGET, Commandant la Région militaire de Tombouctou a donné carte blanche à Fihroun pour régler « l’affaire des délinquants Chamanamass » pour reprendre l’expression méprisante du message officiel. Face au refus de Fihroun de sévir contre les Chamanamass, les Français en juin 1905 à Tombouctou ont demandé aux Kountas de contrecarrer même au prix du « nettoyage tribal » la révolte des Chamanamass.
En juillet 1905, les Kountas armés par les Français de fusils à tir rapide en recherchant les Chamanamass se sont attaqués par surprise aux Kel Ahara, comme l’a confirmé l’enquête menée sans retard par le Capitaine LACROIX à Bourem.
La Convention de Bourem du 15 septembre 1907 créant officiellement la Tribu Iforas, déclarée « indépendante » des Iwillimidens par les Français puis rattachée à l’Annexe de Bourem et celle de Tenekarte (Subdivision de Menaka) du 6 au 7 octobre 1908 ont convaincu Mohamed Ahmed, le Chef de la Tribu Chamanamass de se rendre en 1908 à Gao pour y exprimer sa volonté de reconnaître l’Autorité coloniale française.
Par ailleurs les Chamanamass Kel Takimet ont en 1908 fait leur offre de paix séparée à Kidal sous le parrainage Iforas.
La Convention de Gangaber (Gao) du 12 février 1910 a scellé définitivement la réconciliation entre les Tribus Kountas, Chamanamass, Chérifènes et Iwillimidens.
Les Chamanamass ont adhéré à l’USRDA en lutte pour l’Indépendance du Soudan (actuelle République du Mali) en 1946 à l’initiative de Kiyou Ag Mohamed Ahmed dit Ayyad (1890 - 23 Août 1976), Médaillé d’or de l’Indépendance (N°197) suivant Décret N°107/PR du 21 septembre 1966 ce qui explique leur refus de signer en mai 1958 la Lettre au Général De Gaulle en faveur de l’autonomie de la Boucle du Niger (Soudan).
Personnalités traditionnelles et administratives
- Mohamed Ahmed Al Asal, Chef coutumier de la Tribu Chamanamass, signataire de la Convention de Gangaber du 12 février 1910 ;
- Kiyou dit Ayyad Ag Mohamed Ahmed, Chef de Tribu Chamanamass, Médaillé d’Or de l’Indépendance (Médaille d'or N°197) suivant Décret N°107/PR du 21 septembre 1966, père de l'actuel Maire de la Commune rurale du Tilemsi ;
Décorations
Almoumine Ag Kiyou, Chef de Tribu Chamanamass et Maire de la Commune rurale du Tilemsi (Cercle de Gao) a été décoré le lundi 14 mars 2011 dans le cadre de la cérémonie de décoration des Travailleurs du Ministère de l’Administration Territoriale et des Collectivités Locales (MATCL), ainsi que d’autres citoyens maliens qui a eu lieu dans la salle de réunion dudit Département sous la présidence du Général Kafougouna KONE, Ministre de l’Administration Territoriale et des Collectivités Locales, en présence du Grand Chancelier des Ordres Nationaux.
Bibliographie :
1. Barth Heinrich, in BARTH, Edition Anglaise , V, p. 559. Allemand au service du Ministère des Affaires Étrangères britannique en 1850, Heinrich Barth fait partie des plus grands Explorateurs européens de l’Afrique au cours de ses voyages (1850-1855). Barth se rendit à Tombouctou en septembre 1853, savait lire l’Arabe et a appris en outre quelques langues africaines ce qui a facilité son intégration et ses recherches sur l’histoire de quelques régions, en particulier l’Empire Songhay. Il établit d’étroites relations avec bon nombre d’érudits et de chefs africains, de Muhammad Al Amin Al Kanemi à Bornou, en passant par le Katsina et les Régions de Sokoto, jusqu’à Tombouctou où son amitié avec Ahmad Al Bakkay Al Kounti lui a permis de bénéficier de son hospitalité et de sa protection au moment où le Chef du Macina faisait planer des menaces de mort sur lui. Barth fut également le premier à attirer l’attention de la science occidentale moderne sur l’importance cruciale des sources historiques établies par les Africains eux -mêmes.
2. Docteur A. Richer, Médecin des Troupes coloniales in Les Oullimiden, Touareg du Niger , région de Tombouctou- Gao, Paris, Larose, 1924.